Structurer une programmation pour l’entraînement Compétitif

Pour améliorer mon score au 19.1, je dois faire des intervalles au rameur deux fois par semaine? refaire Karen tous les 3 jours? intégrer des Metcons avec ces deux composants constamment dans mon entraînement ?

A travers cet article, nous allons essayer d’apporter une réponse scientifique à ces questions fréquentes qui touchent à la progression dans notre pratique – mais aussi dans le sport en général.

Coach ou athlète s’intéressant à la science derrière l’entraînement, nous vous conseillons vivement de rester jusqu’à la fin. Nous passerons dans un premier temps en revue les anciens modèles de planification, notamment le fameux modèle soviétique de périodisation en blocs, avant d’aborder le sujet principal de l’article : le modèle de préparation physique Dissocié – Associé – Intégré ou Limiter – Bridge – Performance.

  1. Les anciens modèles de planification

La périodisation en blocs et la surcharge-compensation

Les modèles de périodisation en bloc ont émergé dans les années 70-80 dans les pays de l’ex-bloc soviétique. Les entraîneurs des équipes olympiques ont développé et utilisé ces modèles théoriques pour organiser les entraînements des athlètes quelque soit leurs sports.

L’un des modèles les plus connus est l’organisation et la polarisation des phases d’entraînement :

  1. Période de préparation générale (PPG)
  2. Période de préparation spécifique (PPS)
  3. Période pré-compétitive (PPC)
  4. Période compétitive (PC)

Ou encore l’organisation de l’entraînement de force en bloc : Phase d’hypertrophie, phase de puissance, vitesse ou accumulation, phase de force maximale ou intensification, etc…

Leur logique voudrait concentrer chaque phase dans une qualité ou un groupe de qualités physiques et changer lors du passage à un autre bloc en partant du postulat que les qualités développées précédemment se maintiennent et perdurent dans les blocs suivants.

Pour un Athlète, cela reviendrait à réaliser :

  • Une première phase de PPG ou d’accumulation, où le travail de chaque modalités va être séparés (Force/haltérophilie / Filières énergétiques / Gymnastique) et orientés sur le développement d’une base avec un travail d’accumulation de volume ou d’hypertrophie, de strict en gymnastique et d’intervalles pur sur les ergomètres.
  • S’ensuit une phase de PPS ou d’intensification : ici, l’accumulation de volume va laisser place à une augmentation des intensités de travail, l’orientation vers des efforts un peu plus spécifiques et à intensité plus élevée.
  • Puis une phase de PC ou compétition phase :

Le volume de travail sera ici réduit, l’intensité élevée afin de reproduire les efforts de compétition, le but étant de permettre à l’athlète de surcompenser et s’habituer et de se familiariser aux efforts compétitifs.

Une des problématiques autour de ces théories de l’entraînement est qu’elles ont été calquées sur le modèle socio-économique de planification des pays du bloc de l’ex-URSS, où l’on prévoyait des “plans quinquennaux”, des plans de cinq ans fixant des objectifs de production industriel précis et où l’on concentrait l’effort industriel sur un seul domaine choisis. Cette gestion de l’économie ne semble pas avoir été retenue par l’Histoire comme une des plus appropriées, mais elle a influencé les entraîneurs des pays de l’est, qui ont reproduit cette gestion de la préparation physique pour leurs athlètes.

D’autre part, nous pouvons aussi noter que ces méthodes ont été appliquées sur des athlètes nationaux, qui n’avaient que peu d’autres choix que de s’entraîner pour se nourrir et nourrir leurs familles. Tout était optimisé pour qu’ils profitent des meilleures conditions possibles pour progresser – et la douleur ou la fatigue n’étaient pas des facteurs limitants.

Nombre de records internationaux ont été battus suivant ces principes d’entraînements, mais nous réalisons aujourd’hui qu’ils ne sont plus optimaux pour répondre à certaines problématiques et à la réalité complexe qui touche la majorité des athlètes. Notamment car ces principes ne prennent pas en compte les différences inter-individuelles et structurent l’entraînement uniquement selon des principes généraux, sans se concentrer sur l’individu et ses spécificités, à l’image du régime politique en place à l’époque.

Ainsi que sur des théories d’adaptation au stress où nous allons créer volontairement une surcharge -> baisse des performances -> surcompensation, appelé principe de surcharge-surcompensation.

Or la réalité de la nature et des fonctionnement physiologique responsable des adaptations à l’entraînement sont en réalité plus complexes que cela.

  1. Le modèle Dissocié-Associé-Intégré ou Limiter-Bridge-Performance

Que nous soyons coach ou athlète, nous rencontrons souvent une problématique que les modèles classiques de périodisation n’arrivent pas à résoudre ;

  • Nous avons tous déjà vu ou connu un athlète dont le fitness était élevé, étant capable de belles performances à l’entraînement, mais une fois sur le floor, se retrouve désarmé et n’arrive pas à concrétiser le travail de préparation en résultats compétitifs.
  • Ou à contrario, des athlètes constamment en compétition, se dé-conditionnant peu à peu et perdant au fur et à mesure leurs fitness jusqu’à même risquer un burn out ou une blessure.

-> Pour le coach se pose donc la problématique suivante :

  • Comment aider l’athlète ayant fait des progrès sur le plan physiologique, à transformer ses gains en performances sur le terrain compétitif?

ET

  • Comment aider l’athlète déjà performant à maintenir ses capacités physiologiques durant les périodes compétitives, et à les développer le reste de l’année, sans perdre son aptitude à performer le jour j ?

On retrouve souvent les erreurs suivantes dans les différentes préparations d’athlètes :

Faire un travail physiologique et technique, non contextualisé au sport, afin d’améliorer et rehausser les facteurs limitants d’un athlète et sans observer pour autant une amélioration significative des performances.

OU

Constamment travailler et tester de manière spécifique au sport (en faisant des Metcons tout le temps par exemple) avec très peu de travail dissocié, l’athlète peut atteindre ce que l’on appelle un plateau de sa progression voire même un Burn-out.

Par exemple, vous pouvez écrire à un athlète une progression de plusieurs semaines sur rameur de manière à développer son potentiel physiologique mais ses progrès ne vont pas se transférer directement sur sa performance dans un test comprenant du rameur (comme le 19.1 par exemple), cela marchera peut être chez un sujet débutant ou intermédiaire, mais peu de chances sur un sujet entraîné.

Une étape transitoire devra être réalisée de manière à créer un pont entre les capacités physiologiques et l’expression en performance pure.

  • Vous ne pourrez pas augmenter votre 1RM au Squat en faisant une 1RM avec 3 tentatives (comme en compétition de Force athlétique) toutes les semaines, ni en faisant uniquement des 4×10 à 70-75%.
  • Un joueur de foot ne peut améliorer ses capacités techniques et physique en jouant uniquement des matchs ou être meilleur en match en ne faisant uniquement que des intervalles 30:30s à VMA.
  • Et de la même manière, vous pouvez faire faire à cette athlète le 19.1 toutes les semaines, il sera difficile d’observer une augmentation de ses capacités physiologiques, ou une progression sur le rameur de manière générale.

Une étape de rehaussement des limites qu’elles soient techniques, structurelles, psychologiques, physiologiques doit être engagée en passant par un entraînement spécifique à cela.

-> De cette problématique est née le modèle de préparation physique moderne :

Associé-Dissocié-Intégré ou en anglais Limiter-Bridge-Performance.

Ce modèle n’est pas un modèle de périodisation cyclique, mais une manière de classifier les différents types de séances de façon à répondre aux besoins de l’athlète et concilier le travail de développement physiologique de l’athlète et la performance en tests.

Il peut être intégré à n’importe quel type de périodisation, tant que l’impact de chaque type de séance est compris.

Chaque type de séance doit être présent à n’importe quel moment de l’année ou sur n’importe quel phase ou cycle, ce qui varie d’une période à l’autre et le % de répartition de chaque. Lors d’une phase “hors saison” ou éloigné des compétitions, le % de séances de travail dissocié sera plus élevé car nous serons en phase de développement, alors que en période pré-compétitive ou compétitive l’objectif sera de maintenir les qualités, donc le % de celle-ci plus faible et le % de travail d’associé ou d’intégré plus élevé.

Comment se composent les séances d’associé, dissocié et d’intégré ?

  1. Séances Dissocié ou Limiter

Le but de ces séances est de développer les capacités physiologiques de l’athlète ainsi que son efficience technique.

Évidement ce type d’entraînement doit être individualisé de manière relative entre les facteurs limitants de l’athlète et les besoins de son activité.

Ses limitations doivent donc être dans un premier temps identifiées, qu’elles soient techniques, physiologiques ou motrices avec une batterie de tests qui permettront de les cibler.

Les résultats des tests peuvent être ensuite utilisés pour diriger et mesurer par la suite les progressions réalisées sur ces limitations.

Les séances de dissocié correspondent à :

Les filières énergétiques :

  • C’est ici que l’utilité des outils technologiques prennent tout leur sens. Des tests d’efforts avec oxymètre musculaire, spiromètre et cardiofréquencemètre afin de déterminer si l’athlète est limité au niveau du système cardio-vasculaire ou du système respiratoire et orienter le travail en fonction.
  • Les séances de mono-structurel avec des formats et des intensités visant à stimuler des adaptations spécifiques :

HIIT à intensité croissante, intervalles court-court avec récupération active, long slow training par exemple pour les athlètes à limitations cardio-vasculaire.

Intervalles long-long à haute intensité, répétitions de sprints durant une période étendue, nasal breathing training, intervalles en Zone 2, renforcement des muscles inspirateurs par exemple pour les athlètes limités au niveau respiratoire.

  • Mais aussi le travail d’économie de course et sous différentes modalités

: respirations sur positions spécifiques, cardio sous occlusion, intervalles avec modalités mixées, exercices techniques,travail de cadence, analyses vidéos, etc…

Les facteurs de force et de vitesse :

  • Le travail de force maximale sur les mouvements principaux.
  • Le développement des qualités de force-vitesse nécessaire aux mouvements haltérophiles olympique (Snatch et Clean and Jerk).
  • Le travail balistique et pliométrique
  • Le renforcement structurel (bodybuilding, gymnastique strict, isométrique etc…)
  • Développement des qualités d’endurance et de tolérance face au volume (barres maximales ou sous maximales sous fatigue).

Mais cela comprend aussi ce qui vise à améliorer la qualités de mouvement de l’athlète :

  • Le travail technique, de coordination, d’alignement articulaire, d’isométrie en fin d’amplitude, étirements passifs, renforcement unilatéral, etc…

N.B : Les séances de dissocié sont censées avoir un impact moins stressant que les séances d’associé sur l’athlète.

  1. Séance Associé ou Bridge

La logique générale de ces séances est de créer un transfert entre le développement et la performance finale.

Si un athlète est confronté à une difficulté sur un mouvement, que vous construisez une progression visant à développer ce mouvement, l’athlète ne progresse pas directement sur des tests spécifiques au sport.

Les séances associées vont donc constituer un pont entre le développement pur et les exigences du sport.

Par exemple, après de nombreuses semaines de travail sur rameur, vous avez amélioré votre test référence sur celui-ci, 200 cal for time dans cet exemple. Mais cela ne veut pas dire que vous serez tout de suite meilleur sur le prochain test des Opens comportant du rameur. Pour cela des séances mélangeant stimulus physiologique nécessaire à l’athlète et exigences du sport vont permettre de projeter les améliorations physiologiques en performances sportives – dans ce cas précis, la combinaison du rameur et des wallball sur un effort de 15 minutes.

Les séances d’associé visent à susciter de la confiance chez l’athlète en ses capacités. Elles se composeront d’une stimulation sur les limitations physiologiques de l’athlète mais aussi aux sensations auxquelles il fera face lors du jour J mais de manière contrôlée.

Pour construire des séances de d’associé de manière efficace, vous aurez besoin :

  • Des priorités de l’athlète (points faibles pour un sportif, game plan pour un combattant, poste de jeu et style pour un joueur de football par exemple…)
  • Des connaissances et une analyse des exigences de son sport.

N.B : Les séances associées sont plus stressantes que les séances de dissocié mais moins que les séances d’intégré.

  1. Séance Intégré ou Performance

Faire uniquement des séances de dissocié et d’associé risque de construire des athlètes forts sur des tests physiologiques et performants à l’entraînement, mais psychologiquement fébriles sur des événements compétitifs.

Le but des séances d’intégrer est de recréer l’environnement compétitif et d’exposer l’athlète aux conditions de compétition, ainsi améliorer leur aptitude à performer le jour J.

L’une des particularités et différences entre la compétition et l’entraînement, dans n’importe quel sport, est l’aspect d’incertitude et de chaos. La capacité de l’athlète à gérer ses émotions et à concentrer son attention sur les facteurs qui lui sont contrôlables est une habileté qui doit être entraînée et pratiquée.

Pour construire des séances d’intégrer de manière efficace :

  • Connaître et analyser les demandes du sport
  • Recréer de manière la plus proche possible, l’environnement compétitif (exemples pour le Fitness Fonctionnel : recréer un set-up de compétitions en avançant son matériel à chaque tours, se filmer, réaliser des Metcons en groupes avec un juge, participer à une petite compétition locale, participer à une triathlon afin d’apprendre à nager dans une foules, etc…)

D’autres outils de préparation psychologique peuvent être utilisés, comme l’imagerie mentale, la visualisation et la méditation. Entretenir la concentration de l’athlète dans un milieu stressant pour qu’il/elle puisse se concentrer sur la tâche une fois en compétition.

Ce type de séances sont les plus stressantes. Elles auront tendance à créer moins d’adaptations au niveau physiologique mais elles en créeront plus sur l’ensemble holistique que compose l’athlète.

III. De la théorie à la pratique : exemple de séances.

  1. Dissocié ou Limiter

-> Contexte 1 ; Athlète voulant améliorer ses capacités physiologique, limité au niveau du système cardio-vasculaire (temps référence au 2000m Rameur : 6’40 , 1’40/500m pace)

Warm-Up :

Skill Row

  • 5min Row sans les sangles, focus sur l’activation des extenseurs de la hanche
  • Accumuler 8-10 Sticky Catch Drill
  • 1min Leg only Row
  • 1min Leg + back Row
  • 1min Pause Stroke Row (pause sur le retour niveau des genoux
  • 1min Row @18 S/m (résistance à 10)
  • 1min Row @22 S/m (résistance à 10)

Week 1 :

A. Row : 8x500m (start at 1’55/500m, accélérer de 5sec/500m tous les 100m, 1’55/500, 1’50/500, 1’45/500, 1’40/500, 1’35/500m)

rest 1’30 between

E2MOMx10 @70% effort or 70-80% of Max HR

1 : 1’45 Ski Erg

2 : 1’45 Bike Erg

Week 2 :

A. Row : 10x500m (start at 1’55/500m, accélérer de 5sec/500m tous les 100m)

rest 1’30 between

B. E2MOMx12 @70% effort or 70-80% of Max HR

1 : 1’45 Ski Erg

2 : 1’45 Bike Erg

Week 3 :

A. Row : 8x700m (start at 2’05/500m, accélérer de 5sec/500m tous les 100m)

rest 1’30 between

B. E2MOMx14 @70% effort or 70-80% of Max HR

1 : 1’45 Ski Erg

2 : 1’45 Bike Erg

> Contexte 2 : Combattant de MMA avec un profil de striker rapide et puissant, ayant du mal à garder un régime élevé au-delà du 1er round. Limité au niveau du système cardio-vasculaire

Warm-up :

Lizzard Crawl Progression

2-3sets

  • 10mètres Controlateral crawl + push-up
  • 5 Alternating Slow Body step + reach per side
  • 10mètres Slow Lizzard

Week 1 :

5x 3min ON : 1min OFF @80% effort or 90% of Max HR

15 Calories Assault Bike

10 Solo Sprawl defense ou Burpee

Week 2 :

5x 4min ON : 1min OFF @80% effort or 90% of Max HR

15 Calories Assault Bike

10 Solo Sprawl defense ou Burpee

Week 3 :

5x 5min ON : 1min OFF @80% effort or 90% of Max HR

17 Calories Assault Bike

12 Solo Sprawl defense ou Burpees

  1. Associé ou Bridge

-> Contexte 1 : Athlète voulant améliorer ses capacités physiologique, limité au niveau du système cardio-vasculaire (temps référence au 2000m Rameur : 6’40 , 1’40/500m pace)

Week 1 :


3-4 sets 

2min Row *start at 2’00/500m, increase pace -5sec/500m every 30sec

directly into

2min Row @vitesse visée sur 2000m

repos

repos 3min en marchant

Week 2 :

3 sets

2min Row *start at 2’00/500m, increase pace -5sec/500m every 30sec

directly into

3min Row @vitesse visée sur 2000m

repos

repos 3min en marchant

Week 3 :

2 sets

2min Row *start at 2’00/500m, increase pace -5sec/500m every 30sec

directly into

Max time Row @vitesse visée sur 2000m

repos

repos 5min en marchant

Contexte 2 : Combattant de MMA avec un profil de striker rapide et puissant, ayant du mal à garder un régime élevé au-delà du 1er round. Limité au niveau du système cardio-vasculaire

Week 1 :

3-4 sets

2min Assault Bike @95-100% of Max HR

into

2min Défense et sorties de phase de lutte contre la cage

repos actif 2min sur le Bike

Week 2 :

3 sets

2min Assault Bike @95-100% of Max HR

into

3min Défense et sorties de phase de lutte contre la cage

repos actif 2min sur le Bike

Week 3 : 

2-3 sets

3min Assault Bike @95-100% of Max HR

into

3min Défense et sorties de phase de lutte contre la cage

repos actif 2min sur le bike

  1. Séance Intégré ou Performance

->Contexte 1 : Athlète voulant améliorer ses capacités physiologique, limité au niveau du système cardio-vasculaire (temps référence au 2000m Rameur : 6’40 , 1’40/500m pace)

Week 1 :

1200m Row @vitesse visée sur 2000m

si reussi

Week 2 :

1600m Row @vitesse visée sur 2000m

si réussi

Week 3 :

2000m Row For Time

-> Contexte 2 : Combattant de MMA avec un profil de striker rapide et puissant, ayant du mal à garder un régime élevé au-delà du 1er round. Limité au niveau du système cardio-vasculaire

Sparring :

Week 1 :

2 x 5min avec 1min de repos entre

*un sparring partner frais entrant toutes les 2’30

Week 2 :

3 x 5min avec 1min de repos entre

*un sparring partner frais entrant toutes les 2’30

Week 3 :

4 x 5min avec 1min de repos entre 

*un sparring partner frais entrant tous les rounds